Saint-Norbert

Saint-Norbert, Manitoba

Saint-Norbert - SHSB 26060
L’apparition d’un noyau de population à l’embouchure de la rivière Sale (aussi connue comme La Salle River) remonte au début du 19e siècle, époque de la traite des fourrures.

En 1821, l’union de la Compagnie de la Baie d’Hudson et la Compagnie du Nord-Ouest entraîne la fermeture de près de la moitié des comptoirs de traite et la mise à pied de nombreux engagés canadiens. Parmi ces hommes, il y en a plusieurs qui, avec leurs familles métisses, viennent augmenter la population de la colonie de la Rivière-Rouge. Un certain nombre choisit de s’installer à quelque 14 kilomètres au sud de la fourche de la Rouge et de l’Assiniboine, au confluent de la Rouge et de la petite rivière Sale.

Cet endroit devient en peu de temps le lieu où s’organise, deux fois par an, la plus importante partie de la chasse aux bisons. À la fin de l’été, les chasseurs Métis rentrent chez eux pour passer l’hiver sur leurs lots de rivière boisés. L’une des plus anciennes habitations du Manitoba encore en existence en 1950, la maison Charette, remonte à ces premières années d’existence d’une petite colonie à la rivière Sale.

Par l’an 1845, Monseigneur Provencher, premier évêque de Saint-Boniface, reconnaît que ce regroupement de Métis est assez important pour envoyer une Sœur Grise deux fois par semaine à la « mission de la rivière Sale » pour enseigner la religion aux enfants. La construction d’une église débute en 1855 et deux ans plus tard la mission est organisée en paroisse sous le vocable de Saint-Norbert. Il s’agit de la troisième paroisse catholique dans le Nord-Ouest, après Saint-Boniface et Saint-François-Xavier le long de la rivière Assiniboine.

La population de cette paroisse, qui s’étend vers le sud jusqu’à la rivière aux Rats, augmente rapidement.

Au début des années 1860, on peut y compter presque 1000 personnes. Les Sœurs Grises se chargent de l’instruction des enfants et des soins aux malades. Le troisième curé de Saint-Norbert, l’abbé Joseph-Noël Ritchot, deviendra dès son arrivée en 1862 un ardent défenseur des droits de ses paroissiens et des Métis de la Rivière-Rouge. C’est dans son presbytère que s’organisera à l’automne de 1869 l’intervention des Métis dans les plans du gouvernement fédéral de prendre possession des Terres de Rupert.

Situé sur la piste Pembina qui relie Fort Garry à Saint-Paul, au Minnesota, Saint-Norbert demeure longtemps le dernier arrêt des voyageurs provenant du sud avant d’arriver à leur destination. La paroisse évolue; elle connaît une transformation économique et sociale après 1870 alors que de nombreuses familles métisses vendent ou abandonnent leurs terres au Manitoba pour se diriger vers les plaines de l’Ouest. L’abbé Ritchot, soucieux de conserver le caractère francophone et catholique de sa paroisse, cherche à faire remplacer les Métis qui quittent Saint-Norbert par des nouveaux arrivés canadiens au cours des années 1880. La famille de Benjamin Bohémier est parmi ceux-ci.

Par le début du vingtième siècle, Saint-Norbert est un centre rural typique avec un noyau commercial qui se développe à proximité de l’église et du couvent. La paroisse est dotée de plusieurs institutions religieuses, entre autres le couvent des Sœurs Grises, un orphelinat sous la direction des Sœurs de la Miséricorde nommé l’Asile Ritchot, et le premier monastère trappiste dans l’Ouest canadien, Notre-Dame-des-Prairies, établi en 1892.

Le processus d’urbanisation touche Saint-Norbert de près, alors que la ville de Winnipeg commence à s’étendre de plus en plus en direction sud. Dès 1912 la partie nord de la paroisse de Saint-Norbert est comprise dans la nouvelle municipalité rurale de Fort Garry. Le collège agricole de Winnipeg déménage au quartier actuel de Fort Garry, où il forme une douzaine d’années plus tard le noyau du nouveau campus de l’Université du Manitoba. De plus, les services d’électricité et de tramway se rendent jusqu’à Saint-Norbert.

Les terres agricoles de Saint-Norbert, surtout celles au nord du village, disparaissent graduellement.

La construction de la route périphérique de Winnipeg en 1960 crée une barrière physique entre le village de Saint-Norbert, au sud, et Fort Garry, au nord, qui deviendra banlieue de la ville de Winnipeg en 1972. À Saint-Norbert, le besoin de plus d’habitations à proximité de la ville est comblé par l’établissement de nouveaux quartiers résidentiels dont le premier, Parc La Salle, ouvre en 1964.

Maintenant Saint-Norbert est un quartier en banlieue de Winnipeg, où le caractère francophone est toujours présent dans l’église catholique, l’école française Noël-Ritchot et certains comités, ceci malgré la croissance démographique importante de non francophones. C’est une collectivité qui n’oublie pas ses origines, comme en témoignent ses nombreux sites historiques tels que la Barrière et la Chapelle Notre-Dame du Bon Secours. À l’embouchure de la rivière Sale se trouve également le Parc provincial du Patrimoine de Saint-Norbert, où l’on peut découvrir l’évolution de cette ancienne paroisse du Manitoba français grâce à l’interprétation présentée de trois maisons dont la construction remonte au 19e siècle, soit les maisons Delorme, Turenne et Bohémier.

Texte rédigé par l’équipe de départ responsable de la réalisation d’Au pays de Riel, début des années 2000.

Texte révisé en 2022.

Bibliographie

Centenaire de la paroisse de Saint-Norbert, livre souvenir, 1857-1957.

CULTURE, PATRIMOINE ET CITOYENNETÉ MANITOBA, RESSOURCES HISTORIQUES. Saint-Norbert, 1996, texte anglais sous la même couverture.

DAUPHINAIS, Luc. Histoire de Saint-Boniface, À l’ombre des cathédrales, des origines de la colonie jusqu’en 1870, tome I, Saint-Boniface, Les Éditions du Blé, 1991.

DORGE, Lionel. Essai historique de St-Norbert, village manitobain, 1971.

DORGE, Lionel. Le Manitoba, reflets d’un passé, Saint-Boniface, Les Éditions du Blé, 1976.

« La Barrière de Saint-Norbert », La Liberté, 22 novembre 1916, p. 2, suite dans les numéros du 29 novembre 1916, p. 2 et du 6 décembre 1916, p. 7.

MANITOBA DIRECTION DES RESSOURCES HISTORIQUES. Parc du Patrimoine de Saint-Norbert, 1984.

PRUD’HOMME, L.-A. Monseigneur Noël-Joseph Ritchot, 1825-1905, Winnipeg, Canadian Publishers, 1928.

Souvenir Couvent de Saint-Norbert 1858-1958, 1958.

TELLIER, Corinne C. Revisiting St. Norbert A South Winnipeg Community, Winnipeg, The Fort Garry Historical Society Inc., 1996.

UN PÈRE TRAPPISTE. Une trappe dans un pays de missions: Notre-Dame des Prairies, St-Norbert, Manitoba, Canada. Cinquante ans de vie contemplative 1892-1942, 1943, 240 p.

Patrimoine des Prairies