Nicole Forest Lavergne

Logo manitobaines engagées - un megaphone aux couleurs du drapeau franco-manitobain.

NICOLE FOREST LAVERGNE

Née Forest,  le 6 mai 1950

à Saint-Pierre-Jolys (Manitoba)

Je suis un bébé de la grande inondation de 1950. Les eaux étaient trop dangereuses pour le transport à cheval, alors c’est M. Bourgeois, le « taxi » de Saint-Malo à l’époque qui a conduit mes parents à l’hôpital de Saint-Pierre. Cet établissement venait d’ouvrir ses portes en décembre 1949. Je crois avoir été le troisième bébé né à Saint-Pierre! Maman était tellement effrayée par l’inondation qu’elle a accouché ce soir-là, deux semaines avant la date prévue. La deuxième de cinq filles, je suis arrivée avec la grande crue du ruisseau Joubert! 

Mon père, Camille Forest, était de souche acadienne. Arrière-grand-père Joseph Forest était originaire de Saint-Grégoire de Nicolet, un endroit où bien des Acadiens s’étaient établis après la déportation de 1755 infligée par les Anglais. Il a déménagé à Battleford en Saskatchewan en 1883 et a vécu la rébellion de 1885. À la suite de ces évènements, il déménagea avec sa famille à Saint-Malo en 1892. Je me souviens que mon grand-père, Isidore Forest, était toujours assis dans sa chaise berceuse avec un accordéon ou un violon entre les mains. Il savait jouer des deux instruments. Les fêtes se tenaient chez les Forest parce qu’il y avait de la musique!

Mon père était un homme à tout faire. Quand les « hula hoops » sont devenus à la mode et que nous n’avions pas d’argent, il a pris un vieux tuyau, lui a fait une jointure et voilà — nous avions nos cerceaux! Nous ne possédions pas de tricycle, mais il a construit un petit tracteur avec des pédales, et c’était ça notre tricycle. Tout ce que nous avions, Papa l’avait fabriqué.

Ma mère, Juliette, née Marcotte, était la quinzième d’une famille de 17 enfants, y compris 11 filles et six garçons, dont deux sont morts bébés. Ma grand-mère, Léa Marcotte née Fontaine, dit Bienvenue, était de souche acadienne de la région de Sainte-Hyacinthe (Québec). Mon grand-père maternel, Iréné Marcotte, venait de Sainte-Sophie (Québec), de la région de l’Assomption. Il s’agissait d’un autre endroit où les Acadiens s’étaient réfugiés après la déportation. La famille Marcotte a déménagé à Saint-Pierre-Jolys en 1876, devenant ainsi une des premières familles canadiennes-françaises à s’y installer.

À Saint-Malo, les classes étaient enseignées seulement jusqu’à la 8e année, tout comme aux autres écoles dans la plupart des villages de l’époque. Alors, ma mère est allée au pensionnat à Saint-Charles afin de poursuivre ses études. Elle y a étudié de la neuvième à la onzième année, pour ensuite revenir à Saint-Pierre terminer sa douzième année. Elle a ensuite reçu son permis d’enseigner et a exercé le métier de l’enseignement pendant deux ans.

La famille de ma mère possédait le magasin général, le bureau de poste et la cour à bois à Saint-Malo. Ma grand-mère, Léa Marcotte, n’avait que sa troisième année de scolarité, mais c’était néanmoins elle qui gérait l’entreprise pendant que mon grand-père allait au chantier avec ses quatre fils. Ma grand-mère a siégé au comité de la première Caisse Populaire au Manitoba. À cette époque-là, c’était quelque chose! Elle était reconnue pour son aisance avec les chiffres. Maman disait que les gens arrivaient avec un dessin d’une cabane qu’ils voulaient se bâtir et demandaient à grand-mère : « Qu’est-ce que ça prend, Léa? » Elle faisait un calcul, puis elle leur répondait : « C’est ça que t’as d’besoin. » De même, un autre arrivait avec du bois de chauffage et disait : « Y’a combien de cordes là d’dans? » Elle jetait un œil à la pile et lui donnait la réponse. Elle était vraiment un génie dans le domaine des mathématiques et du calcul.

J’étais proche de ma grand-mère Marcotte, et elle a exercé une grande influence sur ma vie. C’était une femme d’une profonde sagesse qui ne parlait pas beaucoup. Il y avait toujours du monde chez elle! Ma mère et ses sœurs s’y retrouvaient souvent. Elles jouaient aux cartes à longueur de journée! Puis elles étaient des fumeuses invétérées! Elles discutaient de tout et de rien. Aucun sujet n’était censuré. Ce que j’en ai appris, des « secrets »! Puis, si elles n’étaient pas d’accord, elles n’étaient pas d’accord — tout simplement!

Nous étions les seuls de la famille qui habitaient « au large ». En effet, nous vivions dans une ferme à quatre milles à l’ouest de Saint-Malo. Le dimanche, les oncles, tantes, cousins, cousines venaient tous chez nous. Nous organisions des courses « à trois pattes » ainsi que des courses accomplies dans des sacs de jute, et nous jouions à la balle, nous amusant comme ça sans arrêt!

Comme je venais d’une grande famille, mes amies étaient mes cousines. Deux de mes tantes se sont mariées avec des Américains, donc, nos cousines américaines de Walhalla au Dakota du Nord venaient passer l’été chez nous, ou nous allions passer une semaine chez elles.

Maman faisait de la couture tard le soir pour habiller les filles. Pour ma part, je recevais de ma cousine américaine Rochelle les habits qui ne lui faisaient plus. J’étais la seule à qui ces vêtements allaient bien, alors j’en recevais toujours plus que les autres. J’étais chanceuse!

La couture m’a toujours intéressée. Je cousais des vêtements pour mes poupées. Quand on a déménagé au village, Maman donnait des cours de couture aux groupes 4-H. Elle était une des gérantes à l’atelier de couture. Lorsque j’avais 14 ans, la récolte n’avait pas été bonne. On manquait d’argent. Ma mère m’a donc invitée à travailler à l’atelier. Cela m’a permis de m’acheter un manteau d’hiver avec mon propre argent. J’en étais fière!

Nous étions une famille heureuse. Mes parents avaient une grande foi. La bonne entente régnait entre mes parents et nous, les enfants. Le français était très important chez nous, et les livres aussi. Nous avons beaucoup lu!

Native de Saint-Malo, j’ai fait ma scolarité un peu partout parce que nous habitions en campagne. J’ai fréquenté à Saint-Isidore une petite école de campagne où j’ai fait la première à la quatrième année; la grosse école d’Iberville pour les années 5 à 8, car nous avions déménagé, et la 9e année à l’Institut Collégial de Saint-Malo. En 1965, lorsque j’étais en 10e, toutes les frontières scolaires avaient changé. À Saint-Malo, on allait donc à l’école en anglais.

Nicole Forest Lavergne, 1966. Collection privée.

En 10e année, le cours « général » était offert à l’école de Saint-Malo et le cours « universitaire » à l’école de Saint-Pierre. J’ai choisi de finir mes années de secondaire à Saint-Pierre. J’aimais beaucoup l’école et j’étais très studieuse.

J’ai vécu à l’époque des inspecteurs d’école. Dans les petites écoles de campagne, les maîtresses respectaient la loi et nous enseignaient en anglais de peur de perdre leur permis d’enseignement. La même chose s’observait à l’école de Saint-Malo, où nos enseignants regroupaient et religieuses et laïcs. Le français était enseigné à la fin de la journée scolaire. Lorsque l’inspecteur apparaissait, il fallait faire disparaître nos livres français! Il y avait un tiroir sous nos chaises, et c’est là que nous les cachions. J’avais très peur lors de ces visites de l’inspecteur, car on sentait de la tension dans l’air.

Quand nous sommes déménagés au village en 1960, ma mère travaillait à l’atelier de couture où, moi aussi, je travaillais l’été. Au début, elle faisait garder mes deux jeunes sœurs, car Papa éprouvait de la difficulté à accepter qu’elle travaille en dehors de la maison. C’était mal vu par les hommes, et les gens peuvent être méchants : « Que-cé que tu fais au village? Tu fais travailler ta femme? T’es sans cœur. » Il a trouvé ça très difficile et au bout de deux mois, il a dit : « Juliette, les jeunes peuvent rester à la maison. Je m’en occuperai. Je suis capable. » Mon père était un homme très polyvalent. Il cousait, cuisinait, prenait soin des animaux de la ferme — il savait tout faire, et il savait se débrouiller à la maison pendant que Maman travaillait à l’atelier de couture. 

Après ma douzième année, en 1968, j’ai suivi un cours de Junior Accountancy, un nouveau cours qui était offert au Red River Community College. Comme ma grand-mère, j’aimais les chiffres. Mon premier emploi me fut offert par la Chambre de Commerce à Winnipeg. J’ai ensuite travaillé chez Swears and Wells, un magasin de fourrure où je m’occupais des comptes recevables. Mon premier gérant, M. Chapman, était magnifique, et Mme Lehmann m’a presque adoptée! La confection et la réparation des manteaux s’accomplissaient au sous-sol. Je trouvais ce commerce très intéressant. J’ai beaucoup aimé travailler dans cette entreprise.

Depuis ma jeunesse, les activités culturelles et artistiques ont une place importante dans ma vie. Autrefois, on n’avait pas le droit de boire de l’alcool avant l’âge de 21 ans. Lise Préfontaine, une adolescente de Saint-Pierre, planifiait avec ses amis pour les jeunes des soirées dansantes surnommées Le Copain qui se tenaient tous les deux mois. À Saint-Malo, mes cousines et moi organisions également tous les deux mois des soirées de ce genre que nous appelions l’Ami. 

Les boîtes à chansons ont pris naissance dans notre région, et plus spécifiquement au Collège d’Otterburne, grâce au frère Aimé-Onil Dépôt de la congrégation des Clercs de Saint-Viateur. La première boîte à chansons au Manitoba eut lieu en 1965. Ensuite, la famille René Préfontaine en organisait régulièrement dans son grenier. Quelle belle ambiance avec les bottes de foin et la merveilleuse musique! Mais là encore, pas de boisson alcoolisée. On dansait, on s’amusait. Monique Leyrac y est même venue chanter! À la radio de Radio-Canada, on écoutait l’émission de Christian Leroy, Tous les garçons et les filles. La musique française, on adorait! C’étaient les belles années!

En 1967, je suis allée à l’Expo 67 à Montréal en autobus avec 30 jeunes. Il fallait avoir chanté dans trois boîtes à chansons pour participer à ce voyage,  qui était organisé par Aimé-Onil Dépôt, enseignant au Collège d’Otterburne. Et comme j’avais participé à plus de trois boîtes à chansons, on m’a jugée admissible! Quel beau voyage! Nous avons chanté le long du voyage de l’aller et du retour. Grâce à cette expérience, nous avons appris à connaître des jeunes, tous du même âge, qui venaient de Sainte-Agathe, de Saint-Adolphe, d’Otterburne, de Saint-Jean, et de Saint-Malo.

C’était à une fête que j’ai rencontré Raymond Lavergne pour la première fois. Il m’a demandé de danser avec lui la dernière danse, soit la plus importante de la soirée! On ne dansait pas celle-là avec n’importe qui! Nous nous sommes mariés six ans plus tard. J’avais 21 ans et lui 22 ans. J’ai donc quitté mon emploi au magasin de fourrure pour aller vivre à Saint-Pierre avec mon mari.

La famille de mon mari était propriétaire du commerce Lavergne Electric. À l’époque, elle possédait aussi la quincaillerie et les appareils ménagers. Deux neveux de mon beau-père ont acquis le côté appareils ménagers et Raymond a pris la quincaillerie, à laquelle il a ajouté le volet sport. Le moment choisi était parfait! Plusieurs équipes seniors de hockey de Grunthal, de Saint-Pierre et de La Broquerie achetaient leur équipement chez nous. Même l’équipe de Notre-Dame-de-Lourdes faisait ses achats chez nous! Nous étions connus! Nous possédions la machine pour fabriquer les écussons, les logos d’équipe en avant, les numéros en arrière et le nom des jeunes. De plus, nous vendions un nombre incalculable de bâtons de hockey!

C’est moi qui faisais la comptabilité du commerce. Je m’occupais de la paperasse, des lettres, du secrétariat. Nous vendions aussi des permis de chasse et de pêche. Mon beau-père, Fernand, détenait le contrat pour accepter les paiements d’Hydro, et, puisqu’il faisait passer les tests de conduite, on lui avait accordé le contrat d’agent d’Autopac également. Nous avons fermé le magasin en 1992, quand la TPS fut introduite. Les gens allaient magasiner aux États-Unis pour éviter de payer la taxe. En moins d’un an et demi, nous avons dû tout liquider et fermer le commerce.

Nous avons continué à vendre l’assurance et avons fini par racheter les entreprises des autres courtiers du village, mais, malheureusement, nous avions des dettes, et les revenus n’étaient pas suffisants. Je suis retournée au Collège Saint-Boniface pour étudier l’informatique. J’ai ensuite travaillé au Cercle Molière pendant sept ans tout en veillant à la comptabilité du commerce le soir. Au bout de sept ans, j’étais épuisée. C’en était trop! Alors, j’ai démissionné de mon poste au Cercle Molière.

Nous avons ouvert le Gîte de Forest en 1998. C’est un peu arrivé par accident. Nos premiers clients formaient une équipe de l’Office National du Film (ONF). Ils étaient venus tourner Voyage hors du monde avec Réal Bérard à Saint-Pierre. Ils cherchaient une place où toute l’équipe pouvait loger. Alors, nous leur avons offert notre maison. Ils tenaient leurs réunions de production à la table du petit-déjeuner le matin! C’est ainsi, par la force des choses, que nous avons inauguré notre gîte! Au courant des années, nous avons accueilli des centaines de visiteurs de partout. Il y avait des Européens qui ne parlaient ni le français ni l’anglais. Beaucoup de clients se rendaient à Saint-Pierre pour y visiter la parenté ou y célébrer un anniversaire quelconque. Leur famille à Saint-Pierre ne pouvait pas accueillir tout le monde. Un couple est demeuré au gîte six semaines afin de pouvoir veiller un parent mourant. Les deux pouvaient se rendre à l’hôpital de Saint-Pierre à pied. Nous avons fermé le gîte en 2015. J’en avais assez de manquer les rassemblements de famille et d’amis à cause du gîte et des clients dont je devais m’occuper. Cela avait fait son temps, mais ce fut une très belle aventure!

Nicole Forest Lavergne, présidente de la SFM, 2011. Collection privée.

J’ai eu trois enfants au cours de ma vingtaine — une fille et deux garçons. Aujourd’hui, ils sont éparpillés — deux vivent au Canada et l’autre en France! Certaines gens nous demandent : « Qu’est-ce que vous avez fait pour que tous vos enfants soient partis du Manitoba? » Nous leur répondons : « Nous leur avons donné des ailes et leur avons dit qu’ils ne devaient pas rester là juste parce que nous avions un commerce. Nous avons insisté pour qu’ils fassent leurs propres affaires.» Notre fille aînée habite à Canmore. Elle a une maîtrise en bibliothéconomie et travaille pour la ville de Banff. Elle donne aussi des cours d’escalade et est guide d’escalade.

Notre deuxième, Stéfane, est un bébé du mois de novembre. Donc, quand il a fini son cours en informatique, il était encore très jeune, mais ambitieux. Il voulait être chef de projet dès qu’il a décroché son premier emploi à Winnipeg. Le patron lui a dit que les employés plus âgés que lui ne le respecteraient pas. Il a plié bagage et s’est envolé vers Silicon Valley, directement, comme ça! Cependant, il n’y est pas resté. Il était amoureux de la voisine d’en face, à Saint-Pierre, et il désirait qu’elle se joigne à lui en Californie. Puisqu’ils n’étaient pas mariés, elle ne pouvait pas traverser la frontière américaine. Stéfane s’est donc trouvé un emploi au Québec, et c’est là qu’ils résident depuis et élèvent quatre enfants.

André, le plus jeune, est l’artiste qui a obtenu un baccalauréat en arts visuels à l’Université du Manitoba, puis un baccalauréat en design graphique à l’Université du Québec à Montréal, avant de terminer avec une maîtrise en communications globales à l’American University à Paris. C’est là qu’il a rencontré Mélanie. Ils se sont mariés à l’hôtel de ville en plein milieu de la Covid! Mélanie a donné naissance à leur petite Augustine en 2021. Ils étaient seuls, sans famille et masqués d’un couvre-visage.

Nous avons vendu notre cabinet d’assurances fin 2008. Cependant, nous étions toujours propriétaires de l’immeuble que nous avons vendu seulement en 2015. Depuis ce temps, j’écris mes mémoires, et l’été, je jardine. Nous sommes allés passer l’hiver au sud des États-Unis pendant huit ans, mais nous n’y allons plus depuis cinq ans. Nous avons vendu notre motorisé. Les gens nous demandent : « Qu’est-ce que vous faites? » Nous répondons : « Eh bien, nous rendons visite à nos enfants. Nous faisons tellement pitié, étant OBLIGÉS de voyager à Canmore, au Québec, à Paris… C’est pas drôle! »

Je suis soprano au sein de la chorale des Blés au vent. Une chorale a toujours existé dans ma vie, en commençant par la chorale paroissiale de Saint-Malo et ensuite celle de Saint-Pierre. J’aime le chant; cependant, les bienfaits des amitiés et de l’entraide me plaisent aussi. C’est difficile à décrire, mais, quand on entend le chant de chaque côté de soi et que l’ensemble des voix réussit à atteindre avec justesse toutes les notes hautes, on se regarde et c’est « wow »! On l’a eu!

Je me suis toujours impliquée dans la communauté, entre autres, comme membre du comité de parents des scouts, et du comité de parents du hockey mineur. Nous avons eu la charge de la cantine pendant cinq ans. Ensuite, nous avons  participé au comité économique de la paroisse ainsi qu’au comité culturel, auquel j’ai siégé presque toute ma vie! J’ai aussi siégé à la Chambre de commerce de Saint-Boniface. Grâce à l’appui de Jean-Paul Gobeil, nous avons pu accueillir le politicien Antoine Landry, maire de Caraquet (Nouveau-Brunswick), qui a discuté de l’impact de la culture sur l’économie. C’était en 2004, lorsque la culture était le pauvre petit cousin des sports et toute autre chose qu’on croyait plus importante. La culture était perçue comme une perte de temps et d’argent! Ça coûtait cher en subventions! M. Landry est venu nous présenter l’idée que ce que l’on dépense en culture contribue énormément à la santé économique d’une communauté. Ce fut un grand succès!

Pour moi, dans la vie, il est important de persévérer. Quand on est vraiment convaincu, on ne doit pas lâcher! Tout ce que j’ai fait dans la vie, je l’ai fait par conviction, pas pour des remerciements. En ce qui me concerne, ma langue est dans mes veines. C’est la même chose pour Raymond. Ensemble, nous avons toujours défendu nos droits comme francophones.

Nicole Forest Lavergne, 2022. Collection privée.

Quant aux droits des femmes, nous devons encore en faire beaucoup. Nous en avons fait, c’est certain! Par exemple, aujourd’hui, des femmes sont cheffes d’entreprise, et je trouve ça magnifique! Toutefois, il existe encore plus d’embûches pour une femme qu’il y en a pour un homme à tous les niveaux, que ce soit pour sécuriser un prêt, ou pour faire accepter une idée. J’aimerais qu’on en fasse plus pour les femmes marginalisées et pour la communauté LGBTQ+. Dans mon cas, j’ai une fille et deux garçons, et tous les trois ont appris à cuisiner. Nous faisions les biscuits tout le monde ensemble. À neuf ans, les trois ont appris à faire la lessive. Mon père avait tout fait, alors pour moi, c’était normal. Aujourd’hui, il existe une ligue professionnelle de hockey féminin! Nous avons encore à réaliser des progrès, mais c’est un bon début.

Si j’avais à donner un message aux jeunes femmes, je leur dirais de ne pas abandonner. Il faut toujours exiger le respect de nos droits — toujours. Je ne peux compter le nombre de plaintes que j’ai déposées au Secrétariat aux affaires francophones. Poser ce genre de geste a un effet sur nous tous. Il y a quelque temps, pendant une campagne électorale, quelqu’un était venu prendre notre information, et il s’exprimait seulement en anglais. J’ai insisté sur notre volonté de nous faire servir en français. Si c’est important pour soi, ça en vaut la peine!

 

Propos recueillis en septembre 2023 et rédigés en décembre 2024.

Patrimoine des Prairies